20.4.22
Écrit par
Aurore Squelard
Allumons notre télé ou la radio et nous y découvrirons un monde bien différent de celui que nous avons imaginé pour nos enfants. Ces images de violence, de guerres sur les différents continents, de conflits, de crises humanitaires, de destruction de l’environnement sont une réalité du monde.
Il en existe une autre, une réalité dans laquelle de nombreuses personnes s’engagent, se rassemblent, œuvrent au quotidien pour un monde sans-violence, vivent en harmonie avec la nature, font des choix éclairés en conscience du vivant et de la terre.
Marshall Rosenberg, psychologue clinicien à l'origine de l'approche de la Communication NonViolente (CNV), était convaincu que « notre nature profonde nous porte à aimer, donner et recevoir dans un esprit de bienveillance ». Deux questions, qui me permettent de faire le lien avec mon propos précédent, se sont posées à lui : « Comment se fait-il que nous puissions nous couper de notre bonté naturelle au point d’adopter des comportements violents et agressifs ? Et, inversement, comment certains individus parviennent-ils à rester en contact avec cette bonté naturelle même dans les pires circonstances ? "
La CNV nous invite depuis quelques décennies déjà à changer de regard sur notre manière d’être en relation, en mettant notre attention sur notre langage, qui selon l'utilisation que l'on en fait, nous coupe de notre bienveillance. La relation parent-enfant n’y échappe pas.
Souvent définie comme un outil, puisqu’elle s’intègre notamment au travers d’une pratique du langage, la CNV est avant tout une véritable philosophie de vie. Elle nous propose de mettre de la conscience sur la manière dont nous nous exprimons et dont nous entendons l’autre, et de voir ce qui facilite ou bloque la communication.
Dans les différentes situations que nous sommes amenés à vivre, la CNV nous apprend à distinguer nos pensées de nos observations, à accueillir et gérer nos émotions (comment nous sentons-nous ?), à tenter de les relier à leur cause (de quoi avons-nous besoin ?) et à, ainsi, être en mesure de poser une demande précise, qui soit au service de nos aspirations de vie.
Mettre de la clarté sur ce qui se passe à l’intérieur de nous est le premier petit pas qui nous permet de développer notre capacité d’empathie et de nous relier à ce qui est vivant chez l’autre, installant alors les bases d’un dialogue constructif.
Le processus de CNV soutient, en d’autres mots, la transformation de nos pensées, jugements, critiques en observations, sentiments et besoins et développe notre capacité à prendre responsabilité en posant des actions au service de notre vie.
L’intention de la Communication Non Violente est véritablement de nourrir la connexion à soi et à l’autre afin de favoriser une qualité de relation où les besoins de chacun sont pris en compte de manière harmonieuse. Elle nous invite à ralentir et à prendre soin de la vie.
Illustrons ces propos : face à un comportement de l’un de nos enfants, plutôt que de nous positionner vis-à-vis de lui en juge moralisateur, nous allons concentrer notre attention sur les besoins qui sont nourris ou pas chez nous et voir comment nous pouvons aborder cela, sans que cela ne suscite, chez lui, de la honte ou de la culpabilité.
Par exemple, je dialogue avec ma fille dont je vois le linge propre et repassé joncher le sol de sa chambre (que j’ai évidemment lavé et repassé moi-même quelques heures plus tôt) : au lieu de mon habituel : « mais comment est-ce possible de prendre si peu soin de ses vêtements ? C’est un vrai foutoir ici ! », je pourrais lui partager que lorsque je vois son linge propre sur le sol, je me sens passablement agacée parce que je vois combien j’ai à coeur de préserver mon temps et mon énergie; pourrait-elle s’engager, par exemple, à ranger directement son linge une fois le ménage terminé ? Ou serait-elle ok de s’occuper désormais du repassage de son linge ? Ou…
Je dispose d'une multitude de stratégies différentes pour prendre soin de mon besoin tout en étant à l'écoute de ce qui se vit chez elle.
Or, nous avons été, pour une part d'entre nous, conditionnés et avons grandi dans un monde coupé du vivant, où notre manière habituelle de résoudre les conflits est de choisir la contrainte, d’appliquer des jugements moralisateurs, des exigences, des punitions et des récompenses, convaincus que l'autre est mauvais et mérite d'être puni.
Cette manière de communiquer avec nos enfants, si elle se révèle efficace à court terme (dans le sens où l’enfant finit par faire ce que nous avons exigé de lui), suscite sur le long terme honte, culpabilité, peur et entretient une augmentation de la colère et de la rancœur. Les enfants ne développent aucune aspiration à la coopération, à l’harmonie ou au respect mutuel; ils intègrent le message de la loi du plus fort et découvrent le système de domination. Qu'ils finissent par nous faire payer, à un moment ou à un autre.
L’apport de la CNV dans la relation parent-enfant offre une solution concrète à celles et ceux qui souhaitent approfondir leur relation à eux-mêmes et à leurs enfants, en conscience de leurs aspirations les plus profondes.
Fonder un foyer soutenant où les enfants se sentent en confiance et en sécurité, et dans lequel tous leurs besoins sont respectés, leur donne le goût de se mettre en lien avec les autres, de s’y relier de cœur à cœur et de déployer tout leur potentiel.
En leur offrant cet espace d’accueil et d’amour inconditionnel, en reconnaissant leur unicité, en accompagnant leurs émotions, nous contribuons à leur enseigner, en conscience, comment prendre soin d’eux, des autres, de la planète.
Aurore SQUELARD, formatrice certifiée du CNVC et praticienne en AI-CNV (Accompagnement Individuel avec la Communication NonViolente), est notamment investie dans le développement d’Ess’aimer CNV-Education en Belgique francophone, qui se donne pour mission d’accompagner les adultes et professionnels de l’enfance dans leur posture éducative.
Les membres du groupe se réunissent depuis depuis 2 ans et demi, portés par l’intention commune de rencontrer des parents, enseignants, éducateurs, professionnels de l’enfance pour leur transmettre des savoirs, savoir-faire, savoir-être afin de construire avec eux le monde de demain. Ils sont en effet convaincus qu’'« il est plus facile d’élever un enfant dans la force et la sagesse que de panser les plaies d’un homme » (Traduction inspirée d’une citation de Frédérick Douglass).
En d’autres mots, si les adultes – parents ou référents – qui accompagnent les enfants répondent de façon harmonieuse aux besoins mutuels, en les identifiant, les reconnaissant, les honorant, ils ont la confiance qu’une autre manière d’être au monde est possible. Une manière d’être qui s’appuie davantage sur le besoin de contribuer dans le respect de chacun, la responsabilité et l’autonomie. Ce à quoi nous invite la CNV.
Pour en savoir plus : https://voyageenharmonie.com/ et https://cnvbelgique.be/ess%ce%b1imer-cnv-education/
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